mardi 16 octobre 2007

Un archéologue à l'aise avec les pierres


Les Celtes

Olivier Buchsenschutz

Armand Colin, 278 p., cartes, ill., biblio., index, ISBN 978-2-200-26757-5.

Le grand public se passionne pour les Celtes et cela à juste titre. Les ouvrages de vulgarisation, qui leur sont consacrés sont heureusement nombreux (même si de qualité inégale), ce qui permet de mettre constamment à jour des connaissances constamment renouvelées par la recherche tant archéologique que linguistique. L’auteur, directeur de recherches au CNRS, est archéologue, parfaitement bien placé pour rédiger un ouvrage de synthèse dont la démarche pédagogique en fait une lecture facile pour tout lecteur cultivé. Les défis que doit relever l’historien sont difficiles et les réponses à des questions portant simples que se pose le public, insuffisantes. D’où viennent les Celtes ? Quels territoires occupaient-ils ? Quelle était leur organisation politique ? Non seulement les réponses des meilleurs spécialistes sont incomplètes et lacunaires, mais l’archéologie livre sans cesse de nouvelles données qu’il est souvent ardu d’interpréter en l’absence de sources écrites contemporaines. Entre temps, les archéologues sont passés de quelques milliers à des dizaines de milliers de sites de l’âge de fer. La quantité de connaissances disponibles à ordonner et à exploiter est devenue astronomique.
L’analyse des textes médiévaux irlandais nous renseigne davantage sur le mental des Celtes insulaires que sur leur histoire. Toutefois, ce livre reste l’œuvre d’un archéologue, plus à l’aise avec des pierres qu’avec des interprétations de textes. Il avoue bien volontiers que les archéologues sont réticents pour des raisons idéologiques à extrapoler à partir de leurs données. Difficile pour eux d’interpréter un site à la lumière des conclusions de spécialistes d’autres sciences. Chacun chez soi et les vaches celtiques seront bien gardées.
L’auteur a bien raison néanmoins d’en appeler à la prudence en ce qui concerne les sources écrites. Ainsi, quand il confronte les textes de César sur la frontière entre les Celtes et les Germains qui est totale contradiction avec les preuves archéologiques. Il semble bien établi que César a, pour des raisons d’opportunité, inventé une frontière qui n’existait pas.
L’auteur montre bien que les préoccupations qui guident les spécialistes des Celtes ne sont pas uniquement scientifiques. Ces chercheurs s’inscrivent aujourd’hui dans un modèle culturel dominant tout comme leurs prédécesseurs des années trente et quarante le faisaient dans un sens diamétralement opposé. Cet engagement, comme le précise Olivier Buchsenschutz leur fait « quelque fois refuser des évidences ».
C’est pourquoi il faut souhaiter qu’une nouvelle génération de chercheurs, probablement outre-Atlantique, soit en mesure de rejeter les œillères héritées des modèles idéologiques antérieurs pour réconcilier archéologie et sources écrites, linguistique et ethnologie, ADN et nouvelles méthodes de datation.
Quoi qu’il en soit, cette bonne synthèse met à la portée du plus grand nombre une somme de connaissance remarquable dans le domaine de l’archéologie même si sur le plan des mentalités et de l’univers religieux le lecteur restera sur sa faim. Sur ce dernier point, les lacunes de la bibliographie sont révélatrices des orientations de l’auteur.

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